Paris, le Jeudi 27
Juin 2013
Opérateurs
Télécoms : dinosaures ou mutants ?
La convergence reste à construire pour un avenir radieux pour tous !
La convergence reste à construire pour un avenir radieux pour tous !
Quel avenir à l’horizon 2020 pour les opérateurs Télécom? C’est à
un jeu d’antagonisme qu’invitait par ce titre la conférence du G9+, tenue le 24 Juin. L’opérateur du futur
sera-t-il fixe/mobile/intégré? Sera-t-il grossiste ou un détaillant? Va-t-il
lâcher ses réseaux pour ne se concentrer que sur la gestion de ses
clients ? Les acteurs seront-ils nationaux, européens,
internationaux ?
Les acteurs seront-ils nationaux, européens internationaux ?
Compte-rendu de cet événement qui a réuni :
-
François Artignan, Head of Media and Telecom Finance
de BNP-Paribas
-
Jean-Paul
Arzel, directeur réseaux Bouygues
Telecom
-
Thierry
Bonhomme, Directeur Executive de Orange
-
Philippe
Distler, Membre du Collège de l’Arcep
-
John
Stratton, President de Verizon
Enterprise Solutions
Yves Gassot,
Directeur Général de l’IDATE a animé le débat.
Si les
représentants des opérateurs télécoms et autres invités ont joué au portrait de
l’opérateur du futur, intégré et convergent, qui ne deviendra pas grossiste
pour garder le contact avec le client, qui ne découplera pas la fourniture de
l’infrastructure du déploiement des services, qui ne s’opposera pas forcément
aux OTT*, éventuels partenaires dans la chaîne de valeur, ils ont également
montré les limites de l’exercice. L’opérateur idéal en 2020 reste plus à
inventer qu’à découvrir.
Il ne s’agit
pas de choisir par exclusion entre plusieurs voies possibles, mais de combiner les
différents modèles, de profiter de l’innovation, y compris celle de tierces
parties partenaires, afin de réinventer
des chaînes de valeur durables avec les différents acteurs face aux
pressions d’un contexte macro-économique difficile. C’est le message délivré
des US par John Stratton, président de Verizon Enterprise Solutions. A l’heure
où les frontières se réduisent entre fixe et mobile, où la convergence
voix-données est une réalité, où l’Internet des objets se développe, Verizon veut
« ouvrir et exposer [son] infrastructure physique, les
capacités du réseau à l’innovation des tierces parties, cela permettra
plus d’adoption des services ». Il s’agit de bâtir sur le cœur de
compétence, tout en cherchant à grossir dans l’espace applicatif,
particulièrement le M2M* – par exemple avec la voiture connectée. Cette vision
fait des nouveaux entrants une opportunité et non plus une menace ; "if
you can't beat 'em, join 'em", dit le vieil et efficace adage. Selon Yves
Gassot, directeur général de l’IDATE et animateur du débat, Verizon affiche une
croissance à 8% par rapport à une moyenne sectorielle de 4% aux US et de … -4% dans
les 27 états de l’union Européenne.
Face à ce dynamisme, les opérateurs
télécoms européens historiques font figure de dinosaures. A leur décharge, la
situation en Europe, en récession depuis 2 ans pour aboutir en 2013 au pire premier
trimestre vécu par l’industrie, n’est pas celle des US, notamment sur les
aspects de régulation et de monétisation des services.
«La régulation a renforcé le modèle low-cost aux
dépens de l’investissement »
pour François Artignan, responsable de la branche Media et télécom finance de
BNP-Paribas, « cette industrie solide il y a cinq ans n’est plus un safe-haven
pour les investisseurs. Or elle a besoin d’accès aux capitaux, il ne faut pas
détruire cela ». A-t-on touché le fond ? Le pire peut encore
arriver, selon Thierry Bonhomme, directeur exécutif des services de
communication Entreprises de FT-Orange, citant Neelie Kroes de la commission
européenne au sujet de la suppression du roaming, éventualité envisagée selon
lui sans en mesurer l’impact, un « transfert
de valeur des pays du Sud au profit des pays du Nord ». Si la
régulation européenne ne cesse d’inquiéter les opérateurs, ils restent désireux,
malgré des replis tactiques sur des bases domestiques, d’obtenir à travers la consolidation
européenne les synergies pour investir et innover. Une cible lointaine, faute
d’une réglementation globale et non de la réglementation sectorielle, ce que souligne
Philippe Distler, membre du collège de l’Arcep.
L’Amérique est aussi mieux placée sur la monétisation des services.
Selon Thierry Bonhomme, sur le mobile, un client Verizon paye 2 à 3 fois plus
qu’un client Bouygues ou Orange. Pour lui, il faut sortir de la guerre des prix
en Europe en visant les usages, car: « la valeur s’est déportée vers le terminal
et les applications, on n’a pas su la retenir du côté du réseau, c’est un
facteur à corriger dans le temps pour changer la donne en Europe ». Changer cette donne, c’est augmenter
l’ARPU*, le revenu moyen mensuel par utilisateur. Les opérateurs misent dès
lors sur les ruptures technologiques telles la 4G, les objets embarqués et
l’interface « wearable » (des lunettes Google aux tatouages sur le
bras pour les écrans virtuels), le M2M, le cloud, où de belles opportunités s’offrent
avec le SDN* et « la présence des
applications sur tous les nœuds du réseau » selon Jean-Paul Arzel,
directeur réseaux Bouygues Telecom.
Encore faut-il ne pas se tromper de bataille. Avec quels services monétiser la 4G ?
N’est-on pas face à des investissements colossaux avant d’arriver en Europe à
la couverture des US ou de la Corée du Sud ? « La continuité des réseaux fixes et mobiles,
la couverture des réseaux, l’expérience client autour des usages liés au débit
montant» : Jean-Paul Arzel annonce la bataille des 5 prochaines
années. Pour être compétitifs, les opérateurs télécoms sauront-ils simplifier l’écosytème normatif qu’ils ont fabriqué autour
de l’interopérabilité, frein qu’évitent les OTT ?
Du côté des optimistes, il faut
d’abord prendre des risques et les usages suivront. Ainsi Philippe Distler
pense que « ce sont toujours les technologies qui produisent les services, pas
l’inverse», tandis que d’autres plaident pour une meilleure répartition
des revenus entre fournisseurs de services et opérateurs réseaux. Du côté des
dubitatifs, la mutation des opérateurs télécoms vers la valeur ajoutée des
usages ne pourra se faire sans rétablir la confiance des clients, utilisateurs
et élus, écornée par des promesses non tenues, telle la fibre optique pour tous
à moindre coût.
Par contre les intervenants sont restés
discrets voire muets sur les pourtant nécessaires alliances stratégiques qu'ils
devront lier avec les acteurs du logiciel et des contenus....
Alors dinosaures ou
mutants ? Face à la transformation numérique, ni plus ni moins, rétorquent
les opérateurs télécoms, que n’importe quelle autre société qui n’est pas « digital
native ». Avec l’avantage d’être en position de construire l’avenir,
puisque, conclut Yves Gassot « quels que soient les scénarios, l’écosystème
numérique exigera des accès flexibles, mobiles, à hauts débits ». Il n’y a plus qu’à … adapter le futur.
Sabine
Bohnké, pour le G9+.
*Glossaire:
ARPU (Average Revenue Per Unit/User
) : chiffre d'affaires mensuel moyen réalisé par une
entreprise avec un client. C'est une donnée financière utilisée par les opérateurs
de télécommunication.
OTT : Over-The-Top content, désigne les sociétés
qui utilisent le réseau Web pour délivrer des services multimédia, voix,
données, pour exemple, Skype avec la VOIP et Google avec la TV (Youtube). Ils sont directement concurrents
des opérateurs pour certains services.
Roaming :
ce sont les frais de passage d’un réseau à un autre que les opérateurs se
facturent entre eux et qui se retrouvent sur la facture du consommateur.
M2M : Machine To Machine, désigne la
communication entre objets intelligents, destinée à exploser avec 7 milliards
de mobile, cent milliards d’objets connectés.
SDN :
Software Defined Networking, c’est une séparation architecturale entre le
contrôle (le routage) et le contenu (les données) d’un paquet. Une sorte de
« cloud » réseau pour multiplier les services réseau à valeur
ajoutée, en mettant à disposition de tous les acteurs les applications qui
tournent sur un nœud de réseau, tel un routeur.
A propos de l’Institut G9+
Fédérant aujourd'hui 20 communautés d'anciens de toutes
formations (écoles d'ingénieurs, management, sciences politiques, université),
l'Institut G9+ représente 50 000 professionnels du numérique.
Grands acteurs privés & publics et pôles d'expertise concernés font
naturellement partie de son environnement.
L’Institut G9+ apporte un éclairage investigateur, constructif et
audacieux sur les secteurs du numérique, en transformation
permanente. Acteur indépendant, il catalyse et agite les tendances
d’aujourd’hui et de demain – technologiques, sociétales, marchés,
management, usages – en organisant une trentaine de conférences par
an, ouvertes à tous. Il a pour ambition d'être un think
tank de référence dans ce secteur. Pour en savoir plus: www.g9plus.org
Contact Presse G9+ :
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